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tout leurs clients. Ils ont à leur disposition aujourd hui toutes les données financières et marketing pour monitorer la performance des enseignes, et si nécessaire pour les aider à l améliorer », glisse Gontran Thüring.

Sommes-nous en guerre ? La période actuelle laissera probablement beaucoup de traces dans les relations entre les bailleurs et leurs locataires. Les com- merçants indépendants pourraient être nombreux à ne pas survivre, tandis que les réseaux garderont en tête ce qu ils jugeront comme un manque d accompagnement de la part des propriétaires. « Soit nous entre- rons dans une phase de coconstruction pour tirer les enseignements de la crise, soit nous serons dans une période de guerre, avec une multiplication des contentieux judiciaires »,

Une médiation qui ne fait plus l unanimité

Après plusieurs semaines de médiation, une charte encadrant les reports et annulations de loyers pour la période de confinement et la période de reprise jusqu au 30 septembre 2020 a pu être établie. Le texte a reçu l adhésion des fédérations de bailleurs (CNCC, SFIF, Unpi, AFG, Aspim, FFA) et de certaines fédérations de commerçants (Confédération des commerçants de France, Commerçants et artisans des métropoles de France, fédérations de l habillement, de l équipement du foyer, des détaillants de la chaussure, de la photographie, etc.). Dans le cadre de cette charte, les bailleurs acceptent de reporter trois mois de loyers pour les commerçants qui en ont besoin, quelle que soit leur taille. Le bailleur et son commerçant doivent s accorder sur le règlement des sommes reportées et l échéancier de remboursement, qui peut s étendre au-delà du 30 septembre si la situation du commerçant le justifie. En outre, la charte prévoit une clause de rendez-vous entre le 1er juin et le 1er octobre afin d organiser la discussion entre le bailleur et son commerçant sur les annulations de loyers. Ces annulations seront examinées en gré à gré, sur la base des critères de chiffres d affaires et des difficultés de trésorerie du commerçant. Elles pourront être accordées sans contrepartie pour les locataires les plus fragiles, ou avec quelques-unes pour les autres. Durant la démarche de médiation, le CNCC estime avoir proposé « des avancées significatives et solidaires » pour soutenir l activité de la filière, notamment en matière de report et dans certains cas de franchise de loyers couvrant la période de confinement comme celle de réouverture. Il recommande même à ses adhérents bailleurs « d appliquer cette charte à l ensemble de leurs locataires, y compris aux adhérents de fédérations qui n en sont pas signataires ». Car 15 fédérations (parmi lesquelles Procos, Alliance du commerce et la Fédération française de la franchise) ont refusé de ratifier le document. « Nous renonçons malheureusement à signer la charte, compte tenu de la faiblesse des dispositifs qu elle propose, qui ne sont pas du tout à la hauteur des enjeux que rencontre le commerce aujourd hui », déclare Emmanuel Le Roch. Les enseignes dénoncent ainsi le fait que la charte prévoit qu un bailleur pourra annuler jusqu à 50 % d un trimestre de loyers. « Selon nous, cette notion n est aucunement un engagement et ne veut rien dire, puisqu elle rend possible l annulation de seulement 10 ou 20 % des loyers, explique le délégué général du Procos. Elle n est donc pas de nature à rétablir la confiance, qui est pourtant impérative dans un moment de crise comme celui-ci, entre le monde des bailleurs et celui des commerçants. » //LERL

« À partir du moment où les commerces rouvrent, l accompagnement des bailleurs n a plus beaucoup de sens »

- David Brami, Point de Vente

prévient Emmanuel Le Roch. Une option que tempère Sébastien Legrix de la Salle : « je ne pense pas qu il y aura beaucoup de contentieux, car il y a des clauses dans les baux, d arbitrage, de médiation, etc. De plus, s il y a une décision en faveur des locataires, cela peut faire jurisprudence et tous les autres vont s y engouffrer. Dans ce cas, ce sera une annulation du loyer sans contrepartie. » Les enseignes saluent aujourd hui le volon- tarisme de certains bailleurs qui ont su reporter leurs échéances de crédit lorsque c était possible pour faire face au manque de trésorerie. En revanche, elles estiment qu un sacrifice supplémentaire manque sur les résultats, notamment pour les SCPI, afin de s assurer que les problèmes ne sont pas juste reportés à demain. D après les données agrégées par Linxea sur 27 SCPI

ayant annoncé un rendement prévisionnel en 2020, le rendement moyen des fonds investis majoritairement en commerce (Pierre Plus, Actipierre Europe, Altixia Commerces, Cœur de Ville et Cristal Rente) s établit à 4,3 %. Afin d éviter l escalade et la multiplication des affaires judiciaires et des faillites d enseignes, le gouvernement a décidé de lancer un processus de médiation mené par Jeanne-Marie Prost et dont l is- sue n a pas été totalement positive (voir enca- dré ci-contre).

Le pragmatisme pour seule issue Au fond, tout le monde n est-il pas dans l obligation de s entendre ? C est ce que pense David Brami, pour qui chacun devra être capable d infléchir sa position en fonc- tion des contraintes de l autre. Une nouvelle donne qui fait dire au cofondateur de Point de Vente que la relation bailleur/locataire va s inverser et que le locataire qui aura son mot à dire dans l avenir. Pour lui, de nouveaux critères vont s impo- ser côté preneurs. « Dans les centres commer- ciaux par exemple, où les enseignes acceptent aujourd hui de payer des frais annexes pour bénéficier du flux des sites, la situation sera différente si la fréquentation baisse drasti- quement Et concernant les centres-villes, au-delà de la rentabilité, par exemple, les taux de vacance et de relocation courts ou longs seront observés de près. Avant, tout se louait, mais il n est pas dit que cela continue. » « À court terme, peut-être, tempère Emmanuel Le Roch. Car si la vacance est élevée et que le vivier de locataires potentiels s effondre, les arguments pour faire baisser les loyers seront nombreux. Mais à plus long terme, si l activité repart à la hausse, la demande suivra et les bail- leurs retrouveront une position de force avec le risque toujours présent d une vision avant tout financière du sujet. » « Nous sommes tous liés : le commerçant a besoin de centres commerciaux de bonne qualité et le propriétaire a besoin

Juin 2020 #166 Magazine Business Immo | 34

EN COUVERTURE / COMMERCE, UNE REPRISE À QUITTE OU DOUBLE