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Et si la crise sanitaire avait encore accen-tué la défiance des zinzins pour l immo-bilier de commerce ? À cette question, l ensemble de la galaxie brokerage retail semble unanime. « La défiance des investisseurs institu- tionnels se confirmait déjà avant l apparition du Covid-19, résume Cyril Zaprilla, Head of Retail Investment France chez BNP Paribas Real Estate Transaction. Ceux qui s étaient détournés de cette classe d actifs ne reviendront pas cette année ! En revanche, ceux encore présents sur le marché disposent de liquidités et cherchent de gros volumes d investissement. Ils restent plus que jamais vigilants sur le couple rendement/ risque et opèrent une veille stratégie pour pouvoir être opérationnels au moment le plus opportun. » Cette défiance à l égard du retail et de certains autres secteurs de l immobilier « se propage éga- lement aux banques, selon Antoine Grignon, codirecteur Capital Markets et directeur du pôle Commerces de Knight Frank France. Ces institutions bancaires demeurent plus attentives à la qualité des actifs et de leurs fondamentaux au moment de financer de nouvelles opérations ». La principale victime collatérale de cette défiance : les centres commerciaux. Dans la quasi-totalité des process de vente en cours, zinzins et autres investisseurs ont posé le stylo pour faire les comptes. « Le cœur du business est touché par une relation conflictuelle entre les bailleurs et les preneurs liée à l annulation ou non des loyers, avance Fabrice Fubert, Managing

Partner d Up ! Real Estate. Conséquence, l aver- sion des investisseurs est de plus en plus forte et les discussions comme les durées de promesses ou d exclusivité ont tendance à s étendre. » Selon nos informations, les pourparlers en vue de la cession des parts d Abu Dhabi Investment Authority (Adia) dans Rosny 2 et Parly 2 s éter- nisent. « Tout est scruté dans le moindre détail pour donner la meilleure chance à ce deal de se concrétiser », assure un observateur du marché. Toujours selon nos sources, un assureur tien- drait la corde sur Parly 2. Quid des chances pour voir ces deux dossiers proches du milliard d euros signés à court terme ? Aucun spécia- liste n ose, à l heure actuelle, se prononcer. Rustines Pour rassurer les zinzins encore présents sur place et éviter que les deals ne prennent l eau de toute part, des rustines sont conçues. Le meilleur exemple ? La finalisation de la vente par Unibail-Rodamco-Westfield (URW) de 54,2 % d un portefeuille de cinq centres com- merciaux tricolores au consortium Crédit agricole assurances/La Française. Pour tenir les délais de ce deal à 1,1 Md initié en février dernier, la SIIC s expose, entre autres, à une garantie locative d un montant maximum de 45 M pour couvrir une éventuelle baisse des revenus locatifs nets jusqu à fin 2024. « Pour rassurer les investisseurs à l acquisition, les garan- ties locatives auront tendance à se généraliser,

stipule Vanessa Zouzowsky, Head of Capital Market Retail de Cushman & Wakefield. Un système, qui, dans le même temps, permet au vendeur de ne pas appliquer une décote du prix de son actif cédé. » Autre élément de taille qui rassure ces zinzins à déposer leurs capitaux dans ces centres commerciaux : la présence d asset managers dans les deals. « URW connaît par- faitement ses sites et rassure sur la pérennité des loyers. Ce deal a permis à la foncière de récupérer du cash, nécessaire en cette période de turbulences, mais surtout rassure le marché sur cette classe d ac- tifs », assure Cyril Zaprilla. En la matière, les deux structures montées par AXA Investment Managers - Real Assets avec Hammerson d un côté et avec Eurocommercial Properties de l autre pour Italie Deux et le Passage du Havre font toujours figure de références sur le marché. Opportunistes Post-coronavirus, les transactions en sale-and- leaseback pourraient retrouver de leur superbe auprès des investisseurs. « Ce type d acquisition représente une opportunité intéressante à double titre, estime Christian Nehmé, Co-Head of Retail, Investment & Leasing chez Savills France. D une part, les enseignes récupèrent du cash pour mieux surmonter la baisse de leurs chiffres d affaires et le remettre dans leur cœur de métier ou l investir dans leur stratégie omnica- nale. D autre part, les investisseurs peuvent se pro- curer des actifs de qualité fournissant des revenus sur le long terme via des baux sécurisés. » Aussi, les investisseurs dits « opportunistes » et privés devraient, en temps de crise, tirer leur épingle du jeu sur le terrain du value add. Récemment, la Société des Grands Magasins s est illus- trée avec la signature de SQY Ouest auprès d Hammerson. Le montant de la transaction valoriserait l ensemble de 31 000 m2 à envi- ron 15 M . Pour mémoire, cet actif avait été acquis par la foncière britannique, en partena- riat avec Codic France, pour 38 M . « Suivis par leurs banques, ce type d acteurs pourra, sans encombre, se positionner sur des actifs à retra- vailler vendus à la baisse, voire bradés », prédit un fin connaisseur du secteur.

Retail bashing, again and again 2019 marquait un certain repli de la défiance exprimé par les investisseurs institutionnels sur l immobilier de commerce. Pour éviter qu un vent de manique touche ces zinzins, et par cascade les institutions bancaires en matière de financements, des rustines sont élaborées pour sauver les deals. Par Aurélien Jouhanneau

« Un certain nombre d investisseurs pourraient continuer à être de plus en plus sélectifs sur la classe d actifs commerce »

- Antoine Grignon, codirecteur Capital Market et directeur du pôle Commerces, Knight Frank France

Juin 2020 #166 Magazine Business Immo | 48

EN COUVERTURE / COMMERCE, UNE REPRISE À QUITTE OU DOUBLE