Les green bonds, ou plus littéralement les obligations vertes, ont le vent poupe ! Après une crise sanitaire catastrophique, le « monde d après », comme on le surnomme, s est
empli d une certaine sensibilité en matière d environnement. De quoi encore accélérer le mouvement ? Pour Business Immo, Hans Willert, expert en la matière et Partner du cabinet
de conseil Magellan Consulting, revient sur cet outil financier en vogue.
Propos recueillis par Inès Beaugé
Green bonds : qui finance quoi ?
Business Immo : Qu est-ce qui rend cet outil financier si tendance ?
Hans Willert : Ces dernières années, nous avons connu une forte augmentation de ces green bonds grâce à une certaine prise de conscience face au changement climatique. Rien qu en 2019, plus de 200 Mds$ ont été levés sur le marché mondial et, d ici 2021, il pourrait même atteindre 1 000 Mds$, selon Bloomberg. Par ailleurs, la France se place en troisième position des pays émetteurs de green bonds, derrière les États-Unis et la Chine. Et, alors que la loi sur la transition énergétique vise à limiter les investissements dans les entreprises polluantes, les green bonds au contraire, permettent d investir dans des projets en faveur de l environnement, renvoyant au passage une bonne image de l émetteur. Les green bonds proposent donc une approche positive et non restrictive en matière de protection de l environnement. D autre part, émettre un green bond est plus avantageux, car le rendement à verser est, à titre d exemple, de 3 % contre 3,5 % pour une obligation dite normale. Le coût de financement est donc meilleur, ce qui représente une économie réelle.
BI : Quels sont les secteurs les plus friands de green bonds ? L immobilier figure-t-il en bonne place ?
HW : Aujourd hui, il n y a pas nécessairement un secteur particulier qui domine l émission d obligations vertes, même si les banques en émettent beaucoup. Par ailleurs, il est difficile de généraliser pour quels types de projets green (leurs propres projets ou le financement d un projet de leurs clients) elles utilisent ce procédé. Quant au secteur immobilier, il est, lui aussi, forcément touché par cette tendance. Si un travail certain concernant les problématiques ESG a déjà été effectué dans la chaîne de l immobilier (ce qui transparaît notamment dans les plans d urbanisation d aujourd hui bien différents de ceux des
années 80/90) il reste cependant encore beaucoup à faire. En effet, tout le parc existant nécessitera du travail en la matière. L émission de green bonds a donc un bel avenir devant elle afin de financer, par exemple, des projets d urbanisation et de restructurations vertes.
BI : Comment s assurer du respect de l esprit « green bonds », notamment en ce qui concerne la traçabilité des fonds et l impact réel sur la réduction d EGES ?
HW : Il n y a pas de réglementation ferme en ce qui concerne les greens bonds. Pour y parvenir, il faudrait que tous les pays se mettent d accord et, afin d obtenir un tel résultat, il faudrait se lever très tôt ! En revanche, il y a des principes volontaires arrêtés qui sont, eux, mondialement reconnus, notamment par toutes les entreprises cotées en bourse. Parmi ces principes, le processus d émission et de vie d un green bond contient quatre étapes essentielles. La première est la constitution d un dossier. À travers ce dossier, l émetteur indique la répartition de son green bond, investit dans un ou plusieurs projets « verts ». Ensuite, vient l évaluation et la sélection de l émetteur par le maître d ouvrage du projet. Puis, l émetteur doit mettre en place un comité de gouvernance qui suit le projet et vérifie que les conditions de départ sont toujours valables, même après l achèvement des travaux. Par ailleurs, il existe différents organismes de certifications pour les green bonds. Novethic est le plus avancé en la matière en France. Enfin, vient l étape de « reporting » qui consiste à rendre des comptes, minimum une fois par an ou par trimestre, si l émetteur est coté en bourse, afin de décrire comment les fonds ont été utilisés. Ces quatre étapes constituent des contraintes très lourdes à l émission de green bonds et suffisent, jusqu à présent, à maintenir leur respect. Un émetteur peut en effet perdre la certification de green bonds si l une des conditions précédentes n a pas été respectée.
Hans Willert, Partner du cabinet de conseil Magellan Consulting
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39 | Magazine Business Immo #167 Juillet 2020
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